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  • Photo du rédacteurDominique Durand

Lettre N° 7–Janvier 2016

Le corps, lieu de discernement



Il ne devrait y avoir aucune polémique autour de la méditation, c'est une action on ne peut plus ordinaire qui consiste à s'assoir, se sentir respirer, prêter attention à ce qui habituellement ne présente aucun intérêt. Rentrer dans ce qu'il y a de plus commun et banal n'est ni dur, ni exotique,

ni nouveau, c'est une pratique vieille de 2500 ans. Des écrits innombrables se sont échangés à ce propos, mais l'action, elle, reste la même, absolument identique, ce qui engage Jacques Castermane à dire que la méditation n'est pas un mot.

Dans cette manière d'être assis, il n'y a aucun signe de préférence ou de rejet, parce qu'il faut même oublier que l'on pratique zazen. Simplement apprendre l'absence de direction, l'absence de projet pour soi.

Mais alors ? Que reste-t-il ? Rien de ce que le moi peut penser, imaginer, concevoir, espérer.

Rien de ce qui est écrit sur le zen ne peut susciter une quelconque transformation.

« Ce que c'est qu'un pin, apprends-le du pin », nous dit Bashô.

C'est l'action du corps qui nous influence, qui influence notre esprit et non l'inverse. Prenons cet exemple tout simple, comme celui de ranger ses chaussures dans un vestiaire. S'il est possible de laisser le corps dicter et définir un rythme juste dans le déroulé de cette action, celle-ci ne puise plus son origine dans une règle extérieure ; il y a comme un changement de direction : l'action se déroule en harmonie avec ce que le corps décide.

Nous devons mener toute action, y compris celle de méditer, non à partir d'un formalisme externe, mais à partir d'une attitude qui précède la pensée. Ce que peut-être Dogen exprimait en ces termes : « Penser à partir de la non-pensée ».

C'est l'action juste menée de façon juste qui nous indique le chemin et non pas l'idée que l'on a de cette action. Etre assis est l'incitation directe à l'expérience personnelle, celle-ci prend la place de l'observance d'une doctrine ou d'un ordre.

Dans le monde qui est le nôtre, nous faisons l'expérience douloureuse du danger des doctrines. Le corps est un lieu de discernement et de clarté. Voir avec le corps, c'est éviter les dérives, les cloisonnements, les pensées uniques. Bien sûr, nous ne parlons pas d'un corps instrumentalisé ou objectivé, vu de l'extérieur, celui qu'on imagine, mais du corps vivant, celui qui panse ses plaies sans même que l'on ait à intervenir, celui qui traduit en action ce que le moi ne peut pas faire, qui participe d'un mouvement qui ne s'arrête jamais.

La méditation, que nous n'appelons pas méditation..., devient une pratique nécessaire pour revenir au point de départ d'un processus qui ne finit jamais. Grâce à la pratique, réapprendre la différence entre une attitude juste et un pur formalisme : s'assoir et c'est tout.

Le formalisme est une menace pour chacun d'entre nous si nous pratiquons une assise illusoire. Cette « action thérapeutique », nommée ainsi par Jacques Castermane, est plus que jamais essentielle. Le corps est en-dehors de toute doctrine.

La méditation doit vraiment faire partie de notre quotidien en tant que garde-fou par rapport à la folie de l'ego.

« Tout homme éveillé au chemin initiatique perçoit la voix du maître dans la rencontre avec son propre corps » (Karlfried Graf Dürckheim : « Le Maître intérieur »).

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